Apprendre

Le désir d’apprendre

Amplifions le désir d'apprendre

Le processus d'apprendre

Les conceptions de l’apprenant comme tremplin pour l’apprentissage...

Ce qu'apprendre veut dire

Apprendre, comprendre, s’approprier le savoir
Des modèles pour comprendre l'apprendre : de l'empirisme au modèle allostérique.
Re-construire les connaissances

Les conditions pédagogiques favorables

Enseigner n'est pas apprendre
L’agir et le faire
Apprendre ! Un véritable défi

 

 

 

 

 

 

L’envie d’apprendre

André Giordan


“On a envie de foot, on a envie de rap (...) M’sieur !, on a pas envie d’apprendre”. “Ca sert à quoi, c’est relou, c’est antchi !”. C’est ainsi que les jeunes de banlieues voient l’acte d’apprendre. Ils ne sont pas les seuls : apprendre a mauvaise réputation, y compris chez les jeunes qui réussissent.
Il est vrai que le questionnement baisse très rapidement au cours de la scolarité, tandis que la passivité s’accroît. Les élèves des grandes classes attendent que “cela se passe”. En fait, l’école telle qu’elle fonctionne crée globalement du rejet et de l’ennui. Il y a dix ans, on parlait de la génération “bof” ; le phénomène s’est aggravé avec la crise. Pourtant, de plus en plus d’enseignants, notamment dans les quartiers les plus difficiles, tentent de nouvelles pratiques.
Motiver = mission impossible
Pourquoi l’école démotive-t-elle ? La lourdeur et l’inadéquation des programmes par rapport à la vie, la stérilisation des méthodes pédagogiques habituelles en sont sans doute l’origine. L’école répond à des questions que les élèves ne se posent pas. Elle évacue les besoins et les intérêts de l’élève en voulant trop leur faciliter la tâche: “on a rien à faire, tout est déjà préparé”, “le prof, il fait tout, il nous montre”, “on peut jamais rien faire tout seul”. Ce sont des étapes importantes dans la poursuite d’un projet personnel qui sont le plus souvent court-circuitées au travers du découpage des programmes ou de l’organisation des cours,..
L’institution scolaire est ainsi mise au pied du mur. Apprendre est devenu un enjeu essentiel pour une société en mutation et l’envie, le moteur indispensable. “On ne peut faire boire un âne qui n’a pas soif” dit un proverbe très judicieux. De même, on ne peut faire écouter ou travailler un individu sans avoir susciter un intérêt, un désir de savoir ou d’agir. Ce dernier n’apprendra que s’il est intéressé. Pour ce faire, il faut encore qu’il se sente concerné par les situations ou les sujets qui sont abordés.
Cela dit, que faire ? Trouver des solutions au quotidien tient du démiurge. L’envie d’apprendre ne se donne pas par un simple coup de baguette magique. Non ! L’envie est un phénomène à la fois très simple -“la tête du prof. plaît, on apprend pour lui faire plaisir”- et en même temps hypercomplexe à déclencher.
Concrètement, comment susciter cette envie ? Comment la créer quand elle n’existe pas “naturellement” ? D’abord, il ne faut jamais perdre de vue son importance. Jusqu’à présent, toute envie était réprimée à l’école. Les pêchés capitaux ne font-ils pas encore partie de notre fond culturel ?!..
Il y a là un paradoxe à gérer. Apprendre tient de l’effort, pourtant sans désir on ne peut mettre en marche une dynamique aussi coûteuse. Effort et envie sont donc deux tensions à initier en parallèle pour faciliter l’acte d’apprendre.
L’école doit donc se donner pour tâche de soutenir l’envie d’apprendre ou de la créer de toute pièce quand elle est absente. “Donner l’envie d’apprendre” devrait d’ailleurs devenir un de ses projets principaux. Ce n’est en aucun cas une perte de temps, comme le déclare souvent les enseignants. Quand l’envie est là, le reste est plus aisé ; quatre-vingt pour cent du travail éducatif est fait.
L’élève accepte même des pratiques scolaires très rébarbatives quand il est passionné par un sujet ou un projet. Intéressé, il peut travailler par lui-même, s’investir, donner de sa personne. Regardons les jeunes faire du skate ou du roller, il recommence des milliers de fois la tâche, car elle n’est pas perçu comme un exercice avec une progression ; et elle fait sens d’entrée...
Le découpage du temps scolaire est également à repenser. Il est difficile de motiver un élève sur un texte, après un cours d’éducation physique et avant l’interrogation de mathématiques, puis de le remotiver trois jours plus tard ! Tout se joue dans une résonance entre les besoins, les intérêts, les désirs, les attentes, les aspirations d’un apprenant et une ou des situations susceptibles de les satisfaire. Là réside toute la difficulté !
Une activité, pour être motivante, doit prendre en compte ce que nous nommons le projet d’être ou de faire de l’élève. Toutefois, autre paradoxe, le rôle de l’enseignant n’est pas de rester au niveau des désirs immédiats de l’élève. Il doit toujours lui proposer -voire lui opposer- un projet éducatif. Mais, ce contrat éducatif ne peut jamais être avancé à brûle-pourpoint : “ce matin, nous allons étudier les fractions”. L’enseignant doit prendre du temps pour interpeller, concerner ou faire que l’élève se questionne sur le sujet.
Prenons un sujet plutôt rébarbatif, la vie d’un vers de terre. L’enseignant motive s’il resitue la vie de ce dernier par rapport à celle de l’individu. “Il n'y a que moi qui m'intéresse !” a tendance à dire l’élève. Comment fait-on pour vivre ? Comment vivent mes cellules ? Comment un simple vers peut-il accomplir des fonctions alors que mon corps a besoin de 60 mille milliards de cellules ? Ramener les explications à soi, à une histoire qui nous fait vivre ou aux grandes questions sont toujours des sources de motivation.
Pour aborder un savoir, l’apprenant a besoin de ressentir un “vide” ou un “manque” dans son existence. Pour s’intéresser au cerveau, l’élève doit sentir qu’il n’a pas suffisamment de pouvoir sur lui-même ou sur ses capacités propres. Il ne sait pas ce qui se joue dans sa tête, ses connaissances sont insuffisantes pour le faire vivre, et par là, “il rate des trucs”. Connaître le cerveau n’est plus une accumulation de notions style neurones ou neuromédiateurs ; c’est un passage obligé pour atteindre ses désirs ou pour réaliser ses projets.
D’autres approches possibles s’appuient sur le besoin d’identité. Sur des sujets rébarbatifs, comme les opérations, les symétries, les figures géométriques en mathématiques, les savoirs “passent” mieux si on permet aux élèves de s’identifier aux personnages qui ont travaillé ces savoirs, aux questions que ces derniers se posaient ou aux circonstances dans lesquelles ils ont été produits.
Les sources de motivation sont multiples, nous ne pourrons les citer toutes ici (voir l’organigramme ci-joint). Quelques caractéristiques cependant : les situations pédagogiques sont “motivantes” si elles présentent de la nouveauté plutôt que de l’habitude, si elles donnent l’occasion de faire des choix, si elles conduisent à des questions plutôt qu’à des réponses ou si elles permettent à l’individu de se fixer sur un projet à atteindre.
Un élève, engagé dans une compétition sportive se sent obligé d’améliorer sa vitesse. Il se mettra en demeure d’apprendre à faire des exercices de musculation, à développer sa vélocité ou encore à améliorer son démarrage. Cela peut impliquer qu’il se documente sur l’hygiène de vie et sur une diététique particulière, etc.
Le défi pédagogique
Le niveau de compétence, une personnalité bien affirmée chez l’enseignant influencent également la motivation. Un enseignant passionné lui-même pour le contenu qu’il enseigne ou par le fait même d’enseigner donne envie à l’élève de se dépasser. Le regard qu’il porte sur ce dernier sera différent, la passion qu’il met dans ses propos peut être contagieuse.
Au total, l’envie d’apprendre est loin d’être simple à comprendre. Mais l’obstacle n’est pas là. L’obstacle est dans nos têtes d’enseignant. Tout est pensé en terme de panacée, tout doit être maîtrisé. Tout s’éclaire -ou presque- dès que l’on change ces repères. Il ne faut plus envisager la motivation comme une capacité intangible, faite d’un bloc. Il ne faut plus penser pouvoir la favoriser par un seul type d’intervention. Un grand nombre de ressorts interviennent, avec lesquels il faut jouer. Certains sont propres à l’individu, d’autres à la situation d’apprentissage. Tout est dans “l’art” de toucher juste. Un enseignant constamment sur le dos d’un enfant pour le stimuler, l’encourager, crée des blocages souvent profonds. Le métier d’enseignant est bien difficile !..


Pour en savoir plus :

André Giordan, Apprendre, Belin, 1998.
André Giordan, Jack et Françoise Guichard, Des idées pour apprendre, Z’Editions, 1997.
André Giordan et Gérard De Vecchi, L’enseignement scientifique, comment faire pour que ça marche ? , Z’Editions, 1989.
André Giordan, ancien instituteur, est professeur à l’université de Genève et directeur du LDES (Laboratoire de Didactique et Epistémologie des Sciences). Par ailleurs, il est concepteur de textes de vulgarisation, d’émissions de télévision, de pièces de théâtre, d’expositions scientifiques et président de la Commission internationale de Biologie et Education (IUBS).Dynamique de l’envie d’apprendre

Apprendre à faire du vélo comme on apprend à l'école
La première année, nous apprendrons le nom des différentes parties du vélo :
Les chapitres seront le cadre, les roues, les freins.
La deuxième année… les exceptions (pneu sans chambres à air, boyaux avec chambres, vélos à trois roues, à une roue...)
En troisième année, pour joindre la théorie à la pratique, nous aurons des TP ou vous pourrez voir un vélo sur un trépied et même faire tourner une roue à la main et freiner.
Une attention particulière portera sur l'orthographe des parties et sur la présentation de votre compte-rendu de TP.
En quatrième année, nous commencerons l'histoire du vélo et du cyclisme. Les différents tours, de France, de Suisse avec les étapes et les vainqueurs…
Si après cela les élèves ne savent pas faire du vélo, c'est parce qu'on n'a pas pu… finir le programme. Ou alors les bases ont manqué par manque de travail personnel
Ce n’est pas grave, on reprendra cela au cycle après avoir étudié la notion d'équilibre en physique.
Apprendre à faire du foot comme on apprend à l'école
Les deux premières années on apprendra les mouvements de base tels que dribler, faire la passe, tirer au but...
En troisième année, lorsque ces mouvements seront bien assimilés, les élèves pourront étudier le ballon, sa forme, sa structure.
En quatrième année, on étudiera le match et ses règles.
A la fin de la cinquième année, s’ils ont bien travailler, à l'occasion d'une sortie, les élèves assisteront à un match.
Enfin, à l'issue de leur formation, les élèves pourront participer à leurs premiers matchs, en tant que remplaçant… ainsi ils auront l'expérience du terrain.